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Shoot and Kill
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29 juillet 2005

Apportez-moi la Tête d'Alfredo Garcia (Bring me the Head of Alfredo Garcia), 1974, Sam Peckinpah, Mexique/USA

alfredo_garcia

Synopsis :
Un scandale familial force un riche rancheros mexicain à prononcer la sentence titre : Apportez-moi la tête d'Alfredo Garcia. Et ceci contre une récompense d'un million de dollars. Deux des chasseurs de prime parti à la recherche du-dit Alfredo font appel à un pianiste local, Bennie, pour sous-traiter l'affaire. Celui-ci accepte pensant que la récompense qui lui échoira pourra lui garantir à lui et sa fiancée une certaine sécurité financière. Mais le bonheur n'est pas tellement au bout de la route.

Sam Peckinpah était un homme très tourmenté et profondément pessimiste. Souvent considéré comme misanthrope (comme Robert Altman), il était surtout déçu par les autres et lui-même. Les sentiments profonds qu'inspirent ses films dépendaient énormément de sa vie privée. Quand sa relation avec sa régulière était au beau-fixe, ça donne des films calmes (La Ballade de Cable Hogue) ou avec une fin optimiste (chose que l'on reprocha à Guet-Apens) et quand c'était la merde, ça donne Alfredo Garcia. Le monde est dégueulasse, l'Homme est dégueulasse, la vie est dégueulasse, le bonheur n'existe pas. Fataliste et pessimiste jusque au tréfond de ses entrailles putrides, le film n'offre absolument aucun espoir. De toute est façon, tout est foutu d'avance.
Débutant dans une chapelle familiale, Peckinpah donne tout de suite le ton : pour faire avouer le nom de l'homme qui l'a mise enceinte, un père fait maltraiter sa fille par ses hommes de main jusqu'à la dénuder et lui casser le bras. Quand celle-ci se mettra à parler jaillira la phrase-clé : Bring me the head of Alfredo Garcia ! La mise en place est rapide et expédié, on sait d'avance qu'elle sera vite reléguée au rang de sous-intrigue. Et pour tout dire, d'Alfredo Garcia, on en verra jamais. En effet, le pianiste qui accepte la mission (formidable Warren Oates) apprendra assez tôt que primo, il couchait avec sa petite amie, Elita, et que secundo, il est mort dans un accident de voiture. Pensant que l'escapade jusqu'au cimetière où repose le corps pourra créer de nouveaux liens avec elle, il l'emmène sur la route avec lui. La virée est d'abord bucolique, le couple trouve le temps de pique-niquer près d'un arbre, de discuter de leur avenir, le bonheur crépitant entre eux deux est palpable. Des rires, de la tendresse, tout va pour le mieux. Et arrive le premier incident quand deux motards viennent les interrompre lors d'une veillée romantique, l'un d'eux (Kris Kristofferson) prend de force Elita pour l'emmener avec lui. L'ambigûité qui va naitre met forcément mal à l'aise. Nous savons qu'il va y avoir viol, qu'une femme va être souillée, on ressent forcément de la compassion. Alors pourquoi ne se débat-elle pas ? Pourquoi embrasse-t-elle le ravisseur de son plein gré, se laisse-t-elle caresser ? Sam Peckinpah avait déjà créé le même trouble dans Straw Dogs pendant l'abominable scène de viol. On commence alors à douter du réel bonheur qu'elle vit soit-disant avec Bennie, la quête qu'il a entrepris n'a sans doute pas le même intérêt pour elle. Et c'est là qu'intervient le génie de Bloody Sam, les sentiments éprouvés par le spectateur vont être chamboulés puis inversés quand Bennie va tuer de sang froid les deux motards. La pitié qu'on ressentait pour lui et sa compagne s'est déplacée vers les deux hommes. Et c'est le début de la descente aux enfers.
Les tragédies vont se succéder faisant apparaitre la facette nihiliste du film. Tout ne sera plus que haine, violence et fracas. Les paysages mexicains avec ces villages désolés, ces étendues désertiques personnifient à la perfection (qui n'existe pas donc) la misère, la tristesse et la sauvagerie qui se dégage d'Alfredo Garcia (il ferait bien de vérifier sa tuyauterie). Bennie n'a plus rien à perdre et se fiche d'une quelconque rédemption. Tuer n'est plus qu'une formalité. Débute alors une succession de séquences magistralement orchestrées par un Peckinpah en grande forme. Utilisant son gimmick préféré (montage parallèle ultra-cut pour montrer des actions simultanées de quelques secondes), il démontre encore une fois qu'il mérite son statut d'esthète de la violence. Ne désirant pas spoiler le film, j'occulte volontairement la dernière partie. Tout a été dit. Je ferai juste remarquer que Warren Oates doit ses meilleurs rôles à Bloody Sam (Major Dundee, The Wild Bunch) mais aussi à John Milius pour son fameux Dillinger, un des plus grands films de gangsters qui n'ait jamais été fait.

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